Dis Fabeli, qu'est-ce que tu dis?
Je dis que rien n'est simple. Je
dis que tout reste à dire, surtout le bon, le tendre, le doux. C'est celui-là
qu'il faudrait dire en premier. Le reste, le dur, la haine, l'envie, la
jalousie, mieux vaudrait les taire ou bien hurler dans le vide pour crever
l'abcès, se vider et laisser sécher à l'air libre. Mais c'est parfois plus fort
que soi, les mots se bousculent, se battent entre eux, c'est à qui passera le
premier. On a beau plaquer une main sur cette bouche malsaine, ça sort, ça
déborde et les regrets n'y changent rien.
Et les mots doux, ceux qui sont au fond, planqués sous la pudeur, ils restent là, les mots doux. Parce qu'ils n'ont pas le courage de se battre, ce n'est pas dans leur nature. Un mot doux, par définition, il est doux, il a besoin d'un environnement approprié, il lui faut de l'intimité, du silence. On ne va pas se mettre à hurler des mots doux, ça n'a pas de sens. Alors on les entasse dans les creux de son âme, dans les replis de son cœur. Personne ne les voit, ils n'en sont pas moins là, tout doux, tout sages, ils attendent leurs tour. Mais parce que le monde est trop bruyant, ces mots doux que l'on finit par prononcer, personne ne les entend.