extrait de Villa des anges
Jeanne a crié une première fois, puis plus rien. Seulement le murmure agacé d’une femme fatiguée. Maria fumait une cigarette dans le noir de la terrasse.
Les voix se sont enflées soudain. Portes bousculées, murs cognés. Des coups, des cris, des coups, des cris. Amaïa se réveille en pleurant. Jeanne cherche à la calmer d’une voix sourde. Maria, cigarette en suspend, voudrait que tout s’arrête. Un bruit de verre brisé, Jeanne crie, crie encore. Bousculade, silence, cris, hurlements.
Maria, Maria, viens! Viens !
Le ventre en béton, le cœur dans le vide, courir, grimper l’escalier, débouler dans la chambre. Jeanne assise sur son lit, emmêlée dans le foulard. Amaïa serrée contre sa poitrine, immobile, insensible aux câlins hystériques de sa mère. Une tâche rouge sur la robe légère. Si rouge.
Jacques finit de briser ses doigts sur le mur.
L’enfer en quelques secondes. Affolement, désordre, panique.
- C’est pour un bébé, une chute, non, oui …un accident, vite !
Une nuit d’enfer, sirènes hurlantes, gyrophares, hôpital, Amaïa minuscule petite chose inerte emportée par des inconnus. Attendre. Pleurer. Attendre encore. Dans le couloir tiède, vient enfin un médecin fatigué, blouse froissée, barbe naissante. Il a dans les yeux des mots effrayants. A ses pieds, Jeanne s’affaisse, pauvre marionnette privée de fil. Jacques, mains bandées, regard vide, debout, seul, contre un mur.
Extrait de "Villa des anges"