Faim de vie
Tu dois crever de faim. Je crois entendre tes miaulements agacés.
Tu vas de la porte aux fenêtres, tu me cherches, tu t'inquiètes, tu ne comprends pas. Comment ai-je pu te laisser seul? Tu grattes sans doute à la porte du buffet, espérant me voir revenir.
Ils ne m'ont pas donné le temps de te nourrir. Au bruit de leurs bottes dans l'escalier, j'ai prié pour qu'ils passent, encore une fois. Mais c'est à ma porte qu'ils ont cogné. Mon cœur a bondi et tu as filé sous le fauteuil. Ils sont entrés, j'ai crié, ils ont hurlé, m'ont emmenée.
Un semblant de soleil s'acharne sur la vitre sale. Dans un sanglot, ma voisine montre du doigt un gros homme strictement sanglé dans un uniforme. Il tient devant ses yeux une feuille. Dans un raclement de gorge, il s'assure de retenir l'attention de notre pauvre assemblée. Tous les regards se figent, toutes les épaules se tassent, tous les ventres se crèvent de peur. Le gros homme se redresse. Ses lèvres lâchent le premier nom.
Que vas-tu devenir?
© Fabienne Rivayran 2010